■ s o m e w h e r e

Zigzaguant entre les galets bruns, l'eau limpide s'écoulait vivement en un léger clapotement audible. Le courant de cette petite rivière se calma brusquement, ralentissant considérablement sa course afin que la jument puisse plonger allégrement son museau dans l'eau fraiche. Elle se délecta de plusieurs gorgées avant de quitter le contact avec le liquide cristallin et redonner à la rivière son courant habituel. Elle n'utilisait que très rarement son pouvoir, ou alors elle l'utilisait sans vraiment s'en apercevoir. La belle redressa l'encolure et leva les yeux vers la canopée feuillu qui laissait péniblement entrer les rayons du soleils à travers leurs branchages entremêlés. Il était rare qu'elle s'aventure loin des terres du Royaume de l'Eau, peut-être était-ce un besoin de changement ? Ceci étant, elle avait donc décider de errer parmi les terres neutres. S'étirant le postérieur gauche, elle finit par s'ébrouer avant de se mettre en route.

D'un trot naturellement élégant, elle évitait les racines comme si chaque foulée était calculée pour. Ses sens toujours aux aguets, elle entamait une exploration tout en profitant du fabuleux paysage. Ses yeux clairs ne rataient pas le moindre détail, des fleurs colorées, des arbres âgés et majestueux ou des lucioles qui, réputées en ce lieu, dansaient avec joie à l'ombre des arbres. Gardant une cadence souple, la jument garda son trot, profitant de cette promenade pour faire un minimum d'exercice. Ces derniers temps elle restait souvent paisible dans son coin. Un bon trot endurant ou un bon galop lui manquait. Les naseaux de la jument noire frémirent. Elle ronfla discrètement, ses oreilles jouant les girouettes, tentant de capter le moindre son suspect. L'effluve nacrée d'un étalon lui était parvenue. Elle ralentit alors l'allure, avant de finalement passer au pas. Son regard scrutait les horizons tandis qu'elle avait cette forte impression, de se sentir observée.

Il était là quelque part. Elle sentait son odeur qui lui était étrangère. Pourquoi diable ne se montrait-il pas ? La jument ralentissant l'allure se mit en tête de le débusquer. Jeu qu'elle affectionnait beaucoup étant petite. Elle avait toujours été douée pour la discrétion, ainsi elle retrouvait facilement les autres qui se cachaient pour leur flanquer, en général, une frousse de tous les diables. Petite vengeance personnelle lorsqu'ils se moquaient de ses yeux. Mais pour l'heure, cela ne lui rappelait nullement ses jeux d'autrefois, l'amusement n'était pas palpable. Elle fit un pas, puis deux, lorsque le son d'une branche se brisant se fit entendre. La jument plaqua immédiatement ses oreilles en arrière, un ronflement rauque émanant de ses naseaux. Elle était prête à faire face à celui qui l'épiait. Mais rien.

Un lourd silence s'était installé. On aurait dit que la forêt même retenait son souffle. Mais visiblement consciente que ce n'était pas là l’œuvre d'un prédateur, les bruits familiers de la forêt reprirent en chœur et en toute tranquillité. La jument immobile, les muscles crispés sous sa robe d'un noir étincelant, elle écoutait attentivement. Plus un son venant de l'épieur était audible. Il devait s'être arrêté. La jument, silencieusement fit un pas en arrière, puis deux avant de s'arrêter. L'odeur de l'entier était fortement présente à cet endroit, il devait être caché tout près. Elle resta impassible un petit moment avant de brusquement pivoter sur la droite et de plonger à travers un buisson. C'est ainsi qu'abruptement elle se retrouvait littéralement nez à nez avec un étalon alezan. Elle ne lui était pas rentré dedans mais son museau touchait le sien. Elle redressa son encolure et recula d'un pas afin de rompre ce contact importun. « Pourquoi me suivez-vous ? » Demanda-t-elle les oreilles couchées vers l'arrière, visiblement irritée par la situation.

La jument fut surprise en le voyant éclater de rire. Il n'y avait rien d'hilarant pourtant dans tout ça et la situation n'avait rien d'une situation comique. Ou était-ce elle qui avait une apparence à vous faire tordre de rire ? Dans tous les cas la jument ronfla des naseaux, visiblement vexée que l'on puisse rire d'elle, surtout en étant certaine de n'avoir rien fait de cocasse. Elle l'observa reprendre son souffle, espérant peut-être qu'il s'étrangle de rire, n'y voyez aucune méchanceté, mais elle aurait pu rire aussi. Elle croisa son regard avant d'écouter ses excuses. « Pardonnez moi.. Mais vous m'avez trouver de manière étrange.. Je me nomme Bëor. Je suis un feu, mais tu n'as rien à craindre de moi, un acte à était fait entre les eaux et feux. » De manière étrange ? Elle était juste passée à travers se buisson pour lui faire face, elle ne trouvait rien d'étrange à cela. Elle n'y prêta guère plus attention. Alors il venait du Royaume du Feu. Elle ne connaissait aucun cheval de ce Royaume. Ni d'aucun autre Royaume d'ailleurs. Il était rare qu'elle court après les connaissances.

« Tu n'as pas à me craindre je ne te ferais pas de mal. » Pacte ou pas entre les deux Royaumes elle se méfiait toujours des autres. On ne refait pas son instinct. Mais elle n'imaginait aucunement qu'il lui fasse quoique ce soit. S'il avait réellement voulu lui faire du mal, il aurait agit depuis bien longtemps. De toute façon il avait beau faire une tête de plus qu'elle, elle n'allait pas le craindre. Nullement arrogante ou présomptueuse, elle ne se pensait pas extrêmement forte ni très courageuse, mais elle avait apprit à ne pas trembler face à plus grand ou plus fort que soi. Elle finit tout de même pas se détendre, quittant son air revêche. « Je me nomme Delliah » Elle ne précisa pas son Royaume étant donné qu'il l'avait visiblement deviné. L'observait-il déjà lorsqu'elle s'abreuvait ? « Et tu n'as pas répondu à ma question, pourquoi me suivais-tu ? »

« La curiosité est réputée pour être un vilain défaut » Dit-elle un léger sourire au coin des lèvres. Curiosité ou pas ce n'était pas une raison de la suivre de la sorte. C'était une bien étrange façon que d'user de sa curiosité. Delliah n'aurait jamais eut l'idée de suivre quelqu'un sans jamais se montrer. Surtout qu'elle aurait su être découverte par son odeur. Mais la jument ne voulut rien ajouter de plus ayant bien vu l'alezan devenir mal à l'aise avec sa question. Parfois l'on agit imprudemment et sans raison à cause de simples pulsions.

La jument observa l'étalon tandis qu'il devenait bien plus crispé qu'à l’accoutumée. Elle pencha sa tête sur le côté, curieuse de savoir ce qui lui arrivait. Cependant elle restait silencieuse, lorsqu'il rouvrit les yeux, elle ne put cacher sa surprise dans son regard. Les yeux de l'étalon étaient de braise, comme si des flammes dansaient dans ses prunelles. Était-ce l’œuvre de son pouvoir ? Sans doute. Pourquoi ce dernier se manifestait-il ? Avait-il du mal à le contrôler ? Interrogatrice et pourtant toujours aussi silencieuse, la jument l'observa durant tout son petit manège. Il referma les yeux et une fois visiblement calmé, il les rouvrit et ses prunelles reprirent leur couleur naturelle. Étrange spectacle auquel elle venait d’assister sans rien y comprendre. Elle le suivit du regard tandis qu'il quittait le bosquet.

« Tu viens avec moi, je vais par là, on peu faire un petit bout de chemin ensemble ... » Visiblement toujours songeuse suite à ce qu'elle venait de voir, elle le laissa prendre de l'avance avant de finalement le rejoindre d'un trop vif. Elle ralentit arrivé à sa hauteur et repassa au pas. Elle pouvait bien faire quelques pas avec lui, cela ne lui ferait aucun mal. Un peu de compagnie de temps en temps ne la tuera pas non plus. Elle resta silencieuse encore un moment, avant que finalement elle délie sa langue. « Tu as des soucis avec ton pouvoir ? » Finit-elle par lui demander, elle aussi prise de curiosité.

« Non je n'ai jamais eu de problème, mon père m'a appris à le contrôler dès mon plus jeune age. » Elle le regarda peu convaincue et ne préféra ne rien ajouter. Ce qui venait de se passer juste avant qu'ils ne reprennent la route avait été très étrange. Une personne sachant parfaitement contrôler son pouvoir n'aurait jamais agit de la sorte. Mais elle ne voulut pas entrer dans les détails. S'il disait qu'il n'avait jamais eu de problème, elle n'allait pas se mettre à dire le contraire, alors qu'elle ne le connaissait pas du tout. Même si elle ne le croyait qu'à moitié.

Les deux équidés continuèrent leur avancée sous la canopée, à l'ombre des arbres et sans un bruit. Aucun des deux protagoniste ne prononça mot. La jument scrutait les environs du regard, s'attardant sur des détails aussi futiles soient-ils. La beauté de quelques fleurs, l'étrange forme de certaines racines, les rayons du soleil qui s'infiltraient à travers les branchages, offrant de curieux dessins sur le sol. Le chant des oiseaux et des grillons offrait une ambiance mélodieuse et chaleureuse à es lieux. L'ouïe délicate de la jument lui fit ressentir comme un mauvais pressentiment. Elle continuait néanmoins de s'avancer alors que l'entier à ses côtés s'était arrêté.

Elle se tourna vers lui lorsqu'elle ne le sentit plus à ses côtés. « Nous ne sommes pas seuls.. Quelqu'un ou quelque chose nous suit depuis tout à l'heure » Elle pencha légèrement la tête sur le côté avant d'observer le sentier qu'ils venaient d'emprunter. Son pressentiment, aussi léger soit-il, était juste ? Son regard se reposa sur Bëor. « C'est pour ça que mon pouvoir s'est manifesté.. Vient il faut que l'on avance un peu et que l'on trouve un endroit pour se reposer ... » Elle acquiesça d'un signe de tête avant de jeter un dernier regard sur leurs arrières. Elle se remit en route d'un petit trot souple. « Suis-moi, je connais un endroit idéal » Finit-elle par ajouter avant d'accélérer l'allure.

(désolée pour l'attente et le contenu vraiment pas terrible =S)